
Il ne serait pas le bienvenue pour plusieurs
Éric Lapointe demeure, pour plusieurs, une icône du rock québécois. Depuis les années 1990, il a su laisser sa marque dans le paysage musical avec sa voix rauque, ses chansons percutantes et une intensité scénique qui ne laisse personne indifférent.
Ces dernières années, le chanteur a pris un virage plus personnel en mettant de l’avant son cheminement vers la sobriété.
Sobre depuis deux ans, il semble avoir retrouvé une certaine lumière, et plusieurs de ses admirateurs saluent ses efforts pour se recentrer.

Or, sa participation à la Fête du Lac des Nations, un festival qui aura lieu à Sherbrooke cet été, ravive des tensions.

Si plusieurs se réjouissent de le voir revenir sur scène, d’autres s’indignent de sa présence. C’est notamment le cas de l’Escale Estrie, un organisme d’aide aux femmes victimes de violence conjugale, qui a dénoncé publiquement sa participation.
L'une de ses représentantes, Leslie Tran, a exprimé un malaise clair : elle questionne la légitimité d’un événement financé en partie par des fonds publics d’offrir une tribune à un artiste reconnu coupable de voies de fait en 2020.

Selon elle, il est troublant de voir que des ressources collectives permettent à un homme ayant un tel passé de remonter sur scène, alors que des organismes comme le sien peinent à obtenir le financement nécessaire pour aider les victimes.
''Je ressens un profond malaise face à la décision du comité organisateur du Festival du Lac des Nations d’inviter Éric Lapointe à se produire. Une telle décision soulève de sérieuses questions sur la responsabilité sociale d’un événement public financé en partie pour des fonds collectifs.''
Malgré cette prise de position qui a suscité de vives réactions, Éric Lapointe est toujours prévu à la programmation du 16 juillet. L’équipe du festival n’a pas encore commenté publiquement la controverse, mais la pression risque de s’accentuer à l’approche de l’événement.
Ce n’est pas la première fois que le chanteur fait face à ce genre de remous. Son parcours est parsemé de hauts et de bas, et chaque retour sous les projecteurs relance le débat : doit-on séparer l’homme de l’artiste?
Depuis la publication de Leslie Tran, elle a partagé un nouveau texte sur ses réseaux :
Ce matin, je me lève la boule au coeur. Je me demande si j'ai bien fais de dénoncer. Est-ce que c'était une bonne idée? Est-ce que j'ai vraiment tout essayé avant de le faire? Est-ce que c'est dans ma tête? Est-ce que ça va nuire à ma carrière?
J'ai publié une lettre ce matin dans les médias pour non pas dénoncer la présence d'Eric Lapointe dans la programmation de la Fête du Lac, je dénonce le processus décisionnel entourant sa présence. A aucun moment, j'ai demandé à ce que le spectacle soit remplacé. Ce n'était pas le point.
A la sortie de la programmation, j'ai tenté d'ouvrir le dialogue avec le comité pour qu'on puisse partager chacun notre réalité. Je comprend que l'artiste vend des billets. C'est la mission du festival. Mais un évènement d'une aussi grande envergure ne devrait-il pas également être conscient de l'impact social qu'ils ont? Mes demandes de rencontres n'ont jamais abouties.
Si je sors publiquement à minuit moins une, ce n'est pas pour provoquer et les mettre au pied du mur. C'était d'ailleurs une de mes crainte en sortant ma lettre: "bon, une féministe folle qui utilise les médias au lieu d'ouvrir un échange". C'était parce que je n'avais pas le choix, par respect pour les donateurs et nos femmes qu'on héberge et celles qui sont sur la liste d'attente.
Ma grosse crainte, c'est qu'une femme qui était prête dans son long processus de dénoncer son conjoint violent ou juste de parler à son entourage de ce qu'elle vit et qui voit cette programmation se dise: "A quoi bon? sa vie va continuer et moi j'aurai à porter le fardeau de l'étiquette de victime."
L'artiste a fait un spectacle au Théâtre Granada. Je n'ai pas demandé à voir le directeur artistique pour qu'il se justifie car c'est un endroit tout désigné. Eric Lapointe a admis ses tords, il est en thérapie et je suis pour la réhabilitation.
Je pense que c'est une réflexion sociétale que l'on doit avoir, car on réintegre toujours les agresseurs et hommes violents rapidement, alors que les victimes ont des séquelles à gérer parfois toute leur vie. Pourquoi pardonner si rapidement les hommes violents alors que le système n'est aucunement fait pour aider les femmes ?! Elles dénoncent et elles sont laissées à elle même dans un processus ardu qui finit par les abandonner.
Sur ce, je vous jure dans une autre vie, j'aurai moins de principe.
La discussion est loin d’être close, et il est fort à parier que les jours à venir seront marqués par d'autres réactions à ce sujet.
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