
Les cinq soeurs sont devenues les premières quintuplées connues à survivre à l’enfance au pays
Annette Dionne, dernière survivante des célèbres quintuplées Dionne, s’est éteinte à l’âge de 91 ans, emportant avec elle le dernier chapitre d’une histoire à la fois fascinante et profondément tragique.
Son décès, survenu à la veille de Noël, est attribué à des complications liées à la maladie d’Alzheimer. Avec elle disparaît la dernière voix directe d’un phénomène social qui a marqué l’histoire du Canada et bien au-delà.
Née prématurément le 28 mai 1934 à Corbeil, Annette Dionne venait au monde en même temps que ses quatre sœurs, Cécile, Yvonne, Émilie et Marie, dans une famille déjà nombreuse.
Leur naissance, d’une rareté extrême, avait immédiatement attiré l’attention internationale. Les cinq fillettes sont devenues les premières quintuplées connues à survivre à l’enfance au pays, un fait qui sera reconnu officiellement comme événement historique national des décennies plus tard.

Mais derrière la curiosité et l’émerveillement se cachait une réalité beaucoup plus sombre. Très tôt, les sœurs Dionne ont été retirées à leurs parents et placées sous la tutelle de l’État ontarien.
Elles ont grandi dans un environnement médicalisé et strictement contrôlé, dans un complexe conçu spécialement pour elles, devenu une véritable attraction touristique.
Des millions de visiteurs sont venus les observer derrière des vitres, transformant leur enfance en spectacle permanent. Cette exposition massive a généré des revenus colossaux, dont les principales bénéficiaires n’étaient pourtant pas les enfants elles-mêmes.

Annette Dionne a souvent confié, au fil des années, combien cette enfance volée avait laissé des blessures profondes. Comme ses sœurs, elle a porté longtemps les séquelles psychologiques d’avoir été séparée de sa famille, puis renvoyée chez elle sans véritable transition à l’âge de neuf ans.
Le retour à la vie familiale s’est avéré tout aussi déstabilisant, tant pour les enfants que pour leurs parents, peu préparés à reconstruire des liens brisés trop tôt.
Ce n’est qu’à la fin des années 1990 que les survivantes et les héritiers des sœurs décédées ont obtenu une reconnaissance officielle des torts subis. Le gouvernement de l’Ontario leur a versé une indemnisation et présenté des excuses publiques pour les années d’exploitation.

Pour Annette, ce geste représentait une forme de réparation morale, sans toutefois effacer la douleur accumulée au fil des décennies.
Malgré tout, ceux qui l’ont côtoyée décrivent une femme sensible, attachée aux plaisirs simples. Annette aimait profondément les enfants, la nature et la musique. Le piano occupait une place importante dans sa vie, tout comme le chant et la danse, qu’elle a souvent évoqués comme des refuges essentiels pour traverser les moments les plus difficiles.
Avec le temps, elle disait avoir trouvé une certaine paix intérieure, même si le pardon demeurait un chemin complexe.
La disparition d’Annette Dionne a ravivé l’intérêt médiatique autour de l’histoire des quintuplées, jusque dans la presse internationale. Elle rappelle surtout à quel point leur parcours soulève encore aujourd’hui des questions éthiques fondamentales sur la protection de l’enfance, la médiatisation et les abus de pouvoir institutionnels.

Avec son départ, c’est une page majeure de la mémoire collective qui se tourne, laissant derrière elle le souvenir d’une femme marquée par une célébrité imposée, mais qui aura, malgré tout, cherché toute sa vie à se réapproprier son humanité.
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